Le président Ramaphosa vitupère contre une forme de ségrégation sanitaire qui, selon lui et les chefs de l’ONU et de l’UA, frappe son pays. 

Cette quatrième vague qui frappe le pays est portée par le nouveau variant Omicron, détecté dans trois quarts des échantillons positifs analysés au mois de novembre. La grande majorité des nouveaux cas sont détectés dans la région de Johannesburg et Pretoria. S’il est encore trop tôt pour savoir quel sera l’impact d’Omicron sur les services de santé sud-africains, la flambée soudaine des cas prend de court l’Afrique du Sud, qui se retrouve «injustement» isolée.

En 48 heures, deux importants festivals ont été annulés en Afrique du Sud. La multiplication des cas de Covid parmi les organisateurs et les participants a scellé le sort de ces festivités. L’année dernière, l’un de ces festivals s’était transformé en super-propagateur, rappelle notre correspondant à Johannesbourg, Romain Chanson.

Pas question de commettre les mêmes erreurs avec le variant Omicron. Le virus, détecté en Afrique australe fin novembre, se propage plus vite qu’avec le variant Delta et domine les nouvelles contaminations. Omicron a été détecté dans trois quarts des échantillons analysés au mois de novembre. Plus de 11 000 nouveaux cas ont été recensés dans le pays ce jeudi 2 décembre contre 8 000 la veille.

Un million de vaccinés en une semaine

Dimanche, face à un frémissement de vague épidémique, le président Ramaphosa avait fait le choix de ne pas imposer de nouvelles restrictions. Mais depuis son discours, les nouvelles contaminations sont passées de 2 000 à 11 000. Cyril Ramaphosa pourrait réévaluer la situation d’ici la fin de la semaine. 

En attendant, le gouvernement fait campagne pour la vaccination et lance une semaine spéciale à partir d’aujourd’hui. Bons d’achats et tombola intéresseront les primo-injectés. Objectif : un million de nouveaux vaccinés en une semaine. La course contre le variant Omicron est lancée.

En attendant, depuis l’apparition du nouveau variant Omicron, l’Afrique subit-elle un « apartheid sanitaire » dans la lutte contre la pandémie de Covid-19 ? C’est le terme qu’a employé Cyril Ramaphosa, en visite en Côte d’Ivoire. Il a estimé « regrettables, injustes et contraires à la science » les interdictions de voyager avec les pays d’Afrique australe ou le Nigeria, décidées par d’autres États.

« Ces interdictions causeront des dommages incalculables, a déclaré le président sud-africain. Je profite de cette occasion pour appeler une nouvelle fois les pays qui ont imposé ces restrictions de voyage à reconsidérer de toute urgence leur décision et à lever ces interdictions et permettre aux gens de voyager. Si nous respectons le droit de chaque pays à protéger sa population, la coopération mondiale soutenue dont nous avons besoin pour vaincre la pandémie nécessite que nous soyons guidés par la science et pas par l’émotion, et pas par des considérations politiques. En tant qu’Afrique du Sud, nous nous opposons fermement à toute forme d’apartheid sanitaire dans la lutte contre cette pandémie. »

Une attitude protectionniste déjà condamnée mercredi 1er décembre par le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres – qui a parlé d’« apartheid du voyage » – et par le président de la commission de l’Union africaine Moussa Faki Mahamat.

Même position chez le responsable de la réponse au Covid-19 pour le bureau régional de l’OMS Afrique. Pour le docteur Thierno Baldé, la fermeture des frontières n’est pas une solution face au nouveau variant Omicron.

« C’est vrai que l’Afrique du Sud et le Botswana ont été les premiers pays à rapporter ces cas de Omicron mais on n’est pas encore certain que l’origine vient de là, des investigations sont en cours […] Il y a des impacts lorsque l’on décide de fermer ces frontières ou d’arrêter les vols à destination ou en provenance de ces pays [qui recensent des cas du variant Omicron, NDLR], des impacts sociaux, économiques… Il nous faut encore du temps pour comprendre son degré de transmissibilité, de sévérité, l’impact qu’il a sur les tests et les vaccins. Il faut avoir une approche concertée, graduelle, et probablement que les gens reviendront à une meilleure raison pour pouvoir lever certaines de ces restrictions qu’ils ont imposé. Parce qu’on sait clairement que les virus n’ont pas de frontières. »

Un virus sans frontière encore malconnu

Virus sans frontière donc, selon ce spécialiste. Entre-temps en effet, Omicron a été détecté aux Pays-Bas sur un échantillon prélevés dès le 19 novembre. On ne sait pas réellement où ce variant est né. Il est désormais présent dans une trentaine de pays sur tous les continents, et jusqu’en Inde, où deux cas ont été signalés, chez des personnes du sud du pays, qui n’avaient pas voyagé. Les fermetures de frontières paraissent illusoires.

Le président sud-africain a également remercié son homologue ivoirien d’avoir fait preuve de « solidarité » en permettant sa visite en Côte d’ivoire, alors que les interdictions de voyager se multiplient de la part du Maroc, du Canada, du Japon, ou que des restrictions sévères sont instaurées comme en France, qui n’accueille plus que les ressortissants européens en provenance d’Afrique australe. 

Cyril Ramaphosa estime que l’Afrique du Sud paie sa transparence et ses compétences sur le nouveau variant. Isoler son pays est, juge-t-il, « une gifle à l’expertise et à l’excellence africaines », puisque ce sont « nos propres scientifiques qui ont les premiers détecté le variant Omicron ».

Ce nouveau variant a fait souffler un vent de panique à travers le monde, mais il est trop tôt pour dire quel impact il aura sur la pandémie, s’accordent à dire les experts. Sur le papier, le nombre inédit de mutations qu’il comporte laisse craindre qu’il soit plus transmissible et plus résistant aux vaccins. Mais cela reste à confirmer et on ne sait pas s’il est en mesure de remplacer le variant Delta.

Source: RFI

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