Alors que les tensions entre les États-Unis et la Chine, notamment sur la 5G et la crise des composants électroniques, perturbent toujours les développements mondiaux de la high-tech, l’équipementier télécom Huawei accélère son déploiement en Afrique.

Depuis plus de vingt ans, la firme chinoise Huawei fournit à l’Afrique des équipements high-tech de pointe, des centres informatiques pilotés par des programmes d’intelligence artificielle capables de traiter les flux massifs de données, des solutions clefs en main de e-commerce, des systèmes de cybersécurité ou encore des espaces de formation au numérique pour l’ensemble des pays africains.

L’entreprise chinoise, qui était en représentation aux Émirats arabes unis à l’occasion de la 41e édition du Salon international des technologies, du Gitex à Dubaï, démontrerait ainsi qu’elle bénéficie depuis longtemps d’une relation privilégiée avec les gouvernements et les grandes entreprises du continent, nous précise Philippe Wang, vice-président exécutif de Huawei Northern Africa.

RFI : Que représente le continent africain pour Huawei ?

Philippe Wang : Le continent est très important pour notre entreprise. Avec nos partenaires, nous avons intensifié nos activités. Tout d’abord avec les opérateurs télécoms locaux ; puis avec les entreprises et les gouvernements africains dans les secteurs économiques et ceux de l’administration électronique ; et enfin multiplier nos ventes de produits numériques comme des terminaux pour se connecter à l’internet, des montres intelligentes, ou encore des ordinateurs et biens d’autres dispositifs plus grand public que nous produisons.

L’Afrique représente également pour nous une région du monde qui est propice à l’implantation de toutes sortes d’innovations, c’est un continent numériquement vierge qui a une histoire récente avec les technologies. Ainsi nous avons pu déployer des infrastructures télécoms et internet de dernières générations dans de nombreux pays.

L’Afrique s’intéresse aussi au concept des villes dites intelligentes qui demandent beaucoup de ressources informatiques ?

Si le sujet des « villes connectées » semble intéresser les mégalopoles africaines, la réalité sur le terrain est tout autre. Il n’y a pas encore de projets qui vont dans ce sens ou sont véritablement aboutis. La raison en est simple : pour implanter une ville intelligente, il faut d’abord posséder une infrastructure numérique stable et surtout évolutive sur l’ensemble du territoire d’un pays. Et c’est en premier une histoire de priorité, car l’Afrique doit d’abord résorber ses nombreuses zones blanches en développant des réseaux informatiques pérennes.

Le deuxième problème est le retour sur investissement à long terme des partenaires financiers et technologiques qui développeront ces villes intelligentes. Un retour qui ne se produira pas en 2 ou 3 ans, mais bien après 10 ans, dans le meilleur des cas, et plus probablement dépassera les 20 ans, en restant optimiste. Puis il faut aussi que les gouvernements qui supportent ce type de projet fassent preuve d’une « politique souple » afin que ces villes connectées accompagnent tout le secteur de l’économie numérique dans l’ensemble du pays.

En définitive, les concepts de « smart cities » représentent la convergence de plusieurs niveaux d’expertises qui vont de la technologie en passant par la politique et une bonne gouvernance ainsi que le développement de la finance et de l’économie de toute une nation.

Des villes intelligentes qui demandent aussi de mettre en place une administration qui soit totalement dématérialisée et au service des citoyens ?

Oui, et passer d’une administration traditionnelle à une gestion administrative entièrement numérisée n’est pas qu’une simple histoire d’outils technologiques. Il faut que les populations soient aussi formées et éduquées aux nouveaux usages, changer les mentalités, changer la façon de vivre, changer les procédures, c’est plutôt une culture du numérique qu’il convient dans ce cas de favoriser.

Dans le secteur économique, comment aidez-vous les entreprises africaines à traiter les données massives qui transitent par les centres serveurs ?

En fait, c’est exactement le rôle de Huawei d’aider les entreprises à réaliser leur transition numérique. Nous les aidons à construire leurs infrastructures informatiques, nous formons leurs équipes en assurant un transfert de compétences. Mais une fois que le projet de l’entreprise est lancé, nous n’intervenons plus. Actuellement nous parlons beaucoup de l’intelligence artificielle, de systèmes informatiques en nuage ou en cloud avec nos clients africains pour le traitement et l’analyse de données dans le secteur industriel. Tous ces dispositifs sont des briques technologiques qui favorisent le développement économique des sociétés.

Ces systèmes numériques puissants une fois bien utilisés permettent de réaliser de grandes choses, comme d’améliorer la productivité d’une entreprise. Mais en Afrique, il faut aussi que les entreprises se posent la question de savoir si elles ont l’utilité pour l’instant de tous ces dispositifs. Je pense que le continent avec la crise sanitaire a désormais besoin de ces outils informatiques, car les usages du numérique ont explosé. À cause de la pandémie, la demande est immense : les populations doivent travailler à distance, les scolaires sont obligés d’étudier en ligne et les personnes ont besoin de se soigner à distance.

L’Afrique ne dispose pas encore des infrastructures suffisantes qui seraient capables de satisfaire tous ses besoins. En revanche, la situation évolue rapidement, nous considérons désormais le continent comme un laboratoire pour des innovations qui permettraient d’accélérer sa transition numérique dans différents domaines. Nous avons installé des centres de formation dans quasiment tous les pays afin de former gratuitement les jeunes talents avec notre programme intitulé Huawei ICT Academy.

Cette initiative est destinée à la jeune génération pour qu’elle maîtrise et comprenne les enjeux des technologies actuelles et à son tour innove en contribuant ainsi au succès de la transformation numérique du continent.


La firme chinoise réalise 20 % de son chiffre d’affaires en Afrique en proposant ses solutions technologiques à plus de 200 opérateurs télécoms et internet du continent. Elle développe des infrastructures dans les réseaux de 3G et 4G, pour connecter les zones rurales et se positionne actuellement comme un partenaire incontournable dans le déploiement de la fibre optique.

Cependant, si la vision de Huawei en Afrique est de rendre le numérique accessible à tous les Africains quels que soient leurs domaines d’activités, la firme estime devoir œuvrer sur un temps long qui se comptera peut-être en décennies, avant d’obtenir pleinement un retour sur ses investissements.

source: RFI

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici