Tout en restant attaché à la mise en œuvre intelligente de l’accord, «le gouvernement rejettera d’office toute accusation qui serait de nature à le tenir responsable des éventuelles conséquences» de la violation de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (APR) ! C’est ce que le ministère de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale (chargé de l’Accord pour la paix et la réconciliation/APR) a indiqué dans une correspondance adressée (le 24 février 2023) au ministre algérien des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Chef de file de la Médiation internationale dans le processus de paix dans notre pays. Un avertissement qui intervient à un moment de rupture de confiance entre les acteurs concernés avec la suspension par la CMA de sa participation aux instances de mise en œuvre de l’Accord d’Alger. Et le doute va grandissant sur l’avenir de cet accord sans cesse violé par les rebelles de Kidal en toute impunité.
Après avoir longtemps observé une réserve diplomatique par rapport aux agissements controversés des leaders des mouvements de Kidal, le gouvernement malien semble aujourd’hui déterminé à ne plus se laisser marcher sur les pieds. Dans sa correspondance, il se dit prêt à tout mettre en œuvre pour «atteindre ses objectifs, quel qu’en soient le prix et la forme, tout en respectant strictement les droits de l’Homme jusqu’à l’éradication du dernier terroriste ainsi que la sécurisation complète du Mali afin que les populations puissent jouir des dividendes d’une paix tant attendues». Autrement, Bamako juge aujourd’hui inconcevable la collusion entre certains mouvements de la CMA, le HCUA notamment, et des réseaux terroristes comme le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) d’Iyad Ag Ghali.
Ouvertement ainsi accusée par le Mali de tolérer les violations de l’accord par la CMA, la Médiation internationale saura-t-elle s’assumer ? Rien n’est moins sûr d’autant plus que son chef de fil, l’Algérie, ne joue pas le jeu dans cette région où elle partage près de 1 400 kilomètres de frontières avec le Mali, son voisin du sud. L’Algérie a toujours voulu jouer le premier rôle dans la médiation entre notre pays et les leaders des différentes rébellions. Mais, son attitude à l’égard des ex-rebelles et certaines déclarations officielles au sujet de la transition actuelle au Mali ne sont pas de nature à lui conférer la neutralité requise dans ce genre de dossiers.
D’ailleurs, la mise en garde du Mali est intervenue deux jours avant que le président Abdelmadjid Tebboune d’Algérie ne reçoive les ex-rebelles de la CMA le 26 février dernier. Il leur aurait réaffirmé l’engagement de son pays à contribuer à sortir le processus de paix malien de «l’impasse» actuelle. Le président Tebboune aurait réaffirmé l’engagement fort de son pays auprès des Maliens «de tous bords» afin d’aboutir «à une entente sur la diligence d’un élan commun avec des garanties plus strictes».
Et un porte-parole de la CMA a indiqué que la rencontre avait permis de souligner l’engagement ferme de l’Algérie en faveur d’une «nouvelle dynamique de paix dans la région». Il est clair que la médiation internationale, l’Algérie notamment, joue son avenir dans la résolution de la tension. Elle doit faire preuve de réalité et surtout de fermeté (à l’égard de la CMA) afin de prouver sa neutralité dans la médiation.
C’est ce que Bamako attend en tout cas d’elle. Elle doit s’assumer pour sauver une crédibilité remise en cause par la lettre du ministère de la réconciliation, de la paix et de la cohésion nationale (chargé de l’Accord pour la paix et la réconciliation/APR) adressée (le 24 février 2023) au ministre algérien des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger. Et comme l’a souligné le communiqué du gouvernement, en tant que «garante politique de l’Accord et du respect de ses dispositions par les parties», le rôle de la Médiation internationale est primordial pour la mise en œuvre effective de l’accord. Mais, son silence sur des violations répétées par l’une ou l’autre partie jette donc «un discrédit» sur elle et donne l’impression «aux ennemis de la paix un sentiment d’impunité».
La reprise des hostilités signerait l’échec de cet accord à stabiliser le Mali, donc une mort certaine. Même si pour certains observateurs l’APR peut être une composante essentielle d’un retour à la stabilité politique et militaire pour le Mali, le gouvernement est conscient qu’une partie non négligeable des Maliens y est opposée. Ils lui reprochent de porter les germes d’une future partition de leur pays qui, comme l’a récemment déclaré un célèbre avocat du pays, l’a signé le couteau sous la gorge.